Bordeaux 7 par Camille Careau
Le film d’animation Couleur de peau : miel sort en salle le 6 juin prochain. Il s’agit de l’adaptation fidèle et inventive de la bande dessinée du même nom de Jun Jungsik, auteur d’origine coréenne qui vit et dessine désormais à Bordeaux. Ce long métrage déroule un récit autobiographique, son adoption à l’âge de cinq ans par une famille Belge et le début d’une longue quête identitaire entre reniement et acceptation de soi. Rencontre.
Comment ce film a-t-il vu le jour ?
Dans le tome I et II de Couleur de peau : miel, je suis le narrateur et j’évoque mon passé. J’y raconte mon adoption, mon enfance, mon adolescence. Le deuxième album se termine l’année de mes 18 ans au moment où je prends la décision de retourner pour la première fois en Corée du Sud. Quand le second tome est sorti, le réalisateur Laurent Boileau m’a contacté pour me demander si j’accepterais de l’attendre pour faire ce voyage dans le cadre d’un documentaire. Ce projet n’a pas été retenu par les chaînes de télévision. Nous l’avons fait évoluer vers un long métrage d’animation. C’est un objet hybride dans lequel se côtoient des images d’animation, des vues réelles de mon voyage en Corée du Sud, des documents d’archives sur l’histoire du pays
Pourquoi avoir accepté ce projet ?
Ce qui m’a amené au dessin et aujourd’hui au cinéma, c’est l’envie de raconter et transmettre mon histoire. Le film n’est qu’un autre moyen de le faire. Il y avait une grande attente de la part de l’équipe du film qui pensait que je trouverais des réponses. Mais, je n’ai rien trouvé. Cela fait douze ans que je vis en France. J’ai vécu en Belgique, en Thaïlande aussi. Je suis partout chez moi et étranger à la fois. Ce voyage m’a permis d’entamer le début d’une réconciliation entre mes deux identités.
L’esthétique du film est très proche de celle de vos deux albums…
J’ai participé à l’écriture du story-board, au design des personnages afin que l’animation soit conforme à mon univers graphique. Je souhaitais que le trait soit proche de celui que je dessine, un trait accidenté. La BD est en noir et blanc avec beaucoup de lavis, des effets aquarellés. C’était important de retrouver ces effets dans le film en rajoutant de la couleur. Je voulais rester sur une tonalité artistique très sobre. La charte des couleurs est réduite. Il y a de l’ocre, mais pas de rouge par exemple.
Quels sont vos projets ?
Je suis encore bien occupé par le film, mais je prépare la suite de Couleur de peau : miel dans un atelier situé dans la Résidence du Professeur Demons près du Jardin Public. Dans ce troisième tome, il y sera question de mon voyage retour en Corée du Sud et de ma vie de jeune adulte entre 18 et 25 ans.
Couleur de peau : miel de Jun Jung-sik et Laurent Boileau. Sortie le 6 juin. Avant-première Festival (Bègles) mercredi 30 mai à 20h30.
On va essayer d'en être de cette séance au Festival en tout cas !
RépondreSupprimerSud ouest par Rosa Florent et Léa Aubrit
RépondreSupprimerhttp://www.sudouest.fr/2012/05/26/jung-raconte-sa-peau-725762-790.php
Jung raconte sa peau
Le Festival accueillera, mercredi prochain, l'avant-première du film d'animation de Yung, l'auteur de BD. Adaptation d'un de ses albums, il y aborde le thème de l'adoption
Jung, d'origine sud-coréenne, métis, est adopté en 1971, à l'âge de 5 ans par la famille Hénin, Wallonne, Belge, chrétienne… Auteur de bande dessinée vivant à Bordeaux, après quelques allers retours entre la Belgique et la Thaïlande et de nombreuses publications, il décide en 2006 de se lancer dans l'écriture d'une trilogie autobiographique sous la forme d'un roman graphique avec le titre évocateur de « Couleur de peau : miel », évocation de la douceur qui fait sa différence et qui le distingue dans ses pays de naissance et d'accueil.
Enfant, le dessin, expression de sa fuite dans l'imaginaire est comme une bouée de sauvetage, un refuge où s'interroger sur ses racines, son identité. C'est surtout une nécessité vitale.
« Besoin d'extérioriser »
Lors de l'interview donnée à la suite de la projection presse de son film, mardi matin au cinéma Le Festival, Jung a su trouver avec pudeur les mots justes de sa quête identitaire : « Tout petit, j'avais besoin d'extérioriser les choses. Ma quête des origines n'a pas commencé avec mon autobiographie, cela faisait quarante ans que je tournais autour du pot, je racontais toujours les mêmes histoires, les thématiques étaient récurrentes : la quête identitaire, l'abandon, le déracinement, l'adoption, la famille recomposée… Le titre de mes albums vient de ce qu'il y avait d'inscrit sur la fiche de mon dossier d'adoption que j'ai récupéré en Corée du Sud, je l'ai gardé pour le film car, pour moi, on ne se détermine pas par la couleur de sa peau, mais par ses choix, ses actes… ».
En l'écoutant évoquer ses relations à « ses mères, biologique et adoptive », on a le sentiment que tout se joue dans l'« abandon » de l'une et l'« éducation » de l'autre avec au milieu la quête de l'amour maternel.
Ce film hybride, n'est pas une simple adaptation de la bande dessinée portée à l'écran, du 9e art passant au 7e, mais bien la réalisation d'une nouvelle œuvre portée par le talent de ses deux principaux créateurs : Laurent Boileau, réalisateur de documentaire et Jung. C'est de leur rencontre qu'est né le film. Au départ, Laurent Boileau a eu envie, après avoir lu la première bande dessinée de la trilogie, de faire un documentaire sur le retour de Jung en Corée du Sud, puis, petit à petit, l'idée a germé d'y mêler dessin, animation 3D avec un rendu 2D, films familiaux et d'archives, qui font de lui un film à part, un film unique.
L'avant-première à Bègles
Il a été conçu en partie en résidence à Bègles sur les Terres-Neuves, avec le soutien, entre autres, de la Région Aquitaine et d'Ecla, l'agence régionale du livre et de l'audiovisuel. Jung y a été accueilli, à titre gratuit, ainsi que six autres dessinateurs. 80 % des scènes sont des scènes d'animation qui ont été pilotées depuis Bègles, pendant deux ans. Fabrice de La Rosa, directeur du cinéma béglais a dû se battre pour décrocher l'avant-première qui aura lieu la semaine prochaine. « C'est un film émouvant et très drôle où Jung se livre énormément. Il est aussi très original dans sa construction, c'est une autre manière de travailler les choses. » La séance du 30 mai est unique, seules 40 copies seront ensuite distribuées en France pour une sortie nationale le 6 juin.
Mercredi 30 mai à 20 h 30, cinéma Le Festival (barrière de Bègles). En présence du réalisateur Jung. Cocktail après la projection (tarifs habituels du cinéma)