jeudi 23 août 2012

Maiana Bidegain sollicite les internautes pour financer un documentaire sur le monde de la BD

sud ouest par Pierre Penin

Puisque les producteurs traditionnels reculent de plus en plus devant les risques de leur métier, ceux qui consistent à miser sur un projet auquel on croit, Maiana Bidegain a soumis le sien à la vox populi. La réalisatrice bayonnaise a lancé une « collecte » sur le Net, via le site Ulule, pour monter un documentaire sur l'industrie de la BD. Émule de « mymajorcompagny » et consorts, le portail propose au public de financer des créateurs (1). Vous voulez voir ce film, lire ce livre, entendre ce disque ? Offrez-vous directement cette opportunité.

   
Maiana Bidegain vit le quotidien d'un scénariste de bande dessinée, son compagnon Joël Callède. « Je suis témoin d'un paradoxe. Il n'y a jamais eu autant de BD produites et vendues mais il n'a jamais été aussi difficile d'en vivre pour les auteurs. » Elle a commencé à s'intéresser à l'envers de ce microcosme, voilà deux ans. « Sous les bulles, l'autre visage du monde de la bande dessinée », propose d'en ouvrir la porte.

« Enquête économique »
La souscription pour son "doc" entre en résonance avec la moelle de ce travail. Car dans son enquête, Maiana Bidegain va notamment "mettre l'accent sur les relations difficiles entre auteurs de BD et éditeurs". Expliquer comment les auteurs (scénaristes et dessinateurs) à l'origine de la création, donc de l'économie générée par la BD, sont aussi « les plus fragiles » de cette industrie.
« Ce documentaire est une enquête économique », résume sa réalisatrice. Son travail examine le processus de production et de diffusion. Ses étapes et intermédiaires, les différents niveaux de profits, où l'artiste à la genèse des choses doit faire un festin de la portion congrue. « L'auteur de BD récupère 8 % des ventes. Disons 10 pour être généreux », situe Joël Callède
À travers le neuvième art, Maiana Bidegain décrit les mécanismes classiques de toute industrie, auquels n'échappe pas le champ de la production culturelle. « On peut tout à fait faire le parallèle avec le producteur de fraises ou de fromage face aux marges de la grande distribution », estime l'auteur. Mais « le documentaire ne sera pas qu'une critique des intermédiaires », précise sa compagne.

Objectif 10 000 euros.
« L'éditeur a sa place. Les libraires aussi. Mais comment l'occupent-ils ? » La réalisatrice évoque pour ébauche de réponse la conception traditionnelle de ces métiers, celui de passeurs. « Normalement, ce sont des guides. » Dont les créateurs ne peuvent pas à ce jour se passer. Même quand Internet tente d'offrir le rapport direct entre artistes et public. « Ceux que le public finance via le Net entrent dans un second temps dans le réseau de production et diffusion classique. Et puis Internet permet ce lien direct, mais encore faut-il que le public arrive jusqu'aux créateurs. »
Si la frilosité des producteurs a conduit Maiana Bidegain à solliciter les internautes, elle ne travaille pas dans une sorte de posture alternative. « Le but est de monter le documentaire. J'espère que des chaînes de télévisions s'y intéresseront. » Mais avant, elle doit réunir 10 000 euros de souscription grâce à Ulule. « J'aborde tout ça modestement. Je me dis que si je ne réunis pas la somme, c'est peut-être que les producteurs ont eu raison de douter du projet. »
La première semaine de collecte a permis de réunir environ 2 000 euros. Un bon départ. Reste 55 jours pour trouver les 8 000 restants. « Mais le but n'est pas que nos familles financent le projet via le site », sourit Joël Callède. « On aimerait 1 000 ou 2 000 personnes qui investiraient 5 ou 10 euros. » La somme, déjà cinq ou six fois inférieure au budget d'un 52 minutes réalisé dans de bonnes conditions, permettra de poursuivre un ouvrage déjà lancé. Maiana Bidegain a enregistré dix heures de film. « Je pense que j'en aurai au moins autant de plus à la fin du tournage. » Il faudra certainement d'autres financements, ou la suite du parcours tiendra de la « guerrilla », selon l'expression de la réalisatrice. Objectif : un bouclage pour la fin janvier 2013, juste avant le Festival de la BD d'Angoulême.

(1) Les sommes avancées par les internautes, si l'objectif total n'est pas atteint, seront restituées.

1 commentaire:

  1. Sud ouest du jour :
    http://www.sudouest.fr/2012/10/15/bayonne-un-documentaire-sur-la-bd-produit-par-les-internautes-850778-4018.php

    Bayonne : elle produit son documentaire sur la BD grâce aux internautes
    Maïana Bidegain va pouvoir boucler son enquête sur le monde de la bande dessinée. La réalisatrice cherche aujourd'hui un partenaire télévisuel

    "J'avoue que j'y croyais... sans trop y croire. Je suis absolument ravie ! il nous faut maintenant mener le projet à bien." La réalisatrice bayonnaise Maïana Bidegain a joué gros et remporté la mise. Auteure d'un reportage sur le monde de la bande dessinée amorcé il y a plus d'un an, qu'elle ne pouvait mener à bien sans financement, elle a choisi de faire produire sa réalisation par les internautes, via le site de "crowdfunding" www.ulule.com. Pari gagné. Elle reprend sa caméra en novembre.

    Le documentaire ? Une enquête économique sur le monde de la BD, milieu qu'elle connaît bien, pour partager les jours du scénariste Joël Callède. "Sous les bulles - l'autre visage de la bande dessinée" part d'un constat. La difficulté rencontrée par de nombreux auteurs pourtant actifs pour vivre de leur métier alors même que le secteur génère de plus en plus de titres. Une surproduction qui profiterait aux seuls éditeurs et diffuseurs ? La réponse n'est pas aussi simple. Maïena Bidegain ouvre le micro et interroge. Des auteurs dans la dèche, "dont certains vivent un réel désespoir", mais aussi des auteurs de best-sellers dont Jean Van Hamme ("XIII", "Largo Winch") et des artistes engagés dans la défense de la profession comme Fabien Vehlmann (auteur de "Seuls", mais aussi repreneur de "Spirou et Fantasio"), des journalistes ou des éditeurs. "J'ai l'engagement de plusieurs professionnels. Avec notamment, pour ce qui est des éditeurs, une participation de Guy Delcourt..."
    La barre avait été posée à 10.000 euros, seuil minimum à partir duquel elle pouvait commencer à travailler dans des conditions correctes. Les internautes ont participé à hauteurs de leurs moyens et/ou de leurs envies. De ruisseaux en rivières, le financement a été réuni à... 129 % à ce jour. Soit 2.900 euros de bonus qui permettront à la jeune femme d'intégrer des animations graphiques auxquelles elle aurait dû renoncer.
    Le projet a pourtant failli capoter. "Il y a eu une première période d'engouement. Les 3.000 premiers euros sont arrivés très vite. Les contributions ont ensuite marqué le pas durant plusieurs semaines, bloquée autour de 5.000 euros." La jeune femme a dû reprendre son bâton de pèlerin, expliquer, convaincre, parfois même démarcher. "J'ai dû aller voir des personnes qui ne parvenaient pas à contribuer via le site. J'ai dû en outre faire œuvre de pédagogie sur ma démarche. La bande annonce du documentaire est en ligne depuis un an. Nombreux sont ceux qui pensaient qu'il était terminé ou pour le moins financé." C'est finalement un partenariat avec le site spécialisé BDGest.com qui a permis de débloquer les choses. "Ils nous ont permis de toucher un autre cercles de contributeurs. C'est grâce à eux si le montant a pu être réuni."

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