samedi 7 avril 2012

Dernières reliques avant l'abattoir

Sud ouest par Michel Monteil
Les « Sarkozy » rescapés de Luz

Les 17 dessins de Sarkozy que l'illustrateur de « Charlie Hebdo » n'a pas détruits, exposés dès aujourd'hui
Dix-sept dessins rescapés. Leur point commun : un personnage central au front proéminent, à la large bouche et au menton allongé. Il s'appelle Nicolas Sarkozy. En 2010, Luz a décidé de le retirer de sa galerie, qu'il s'agisse des simples dessins épurés ou des planches, mini-bandes dessinées au texte dense, qu'il publie dans « Charlie Hebdo », « L'Humanité » ou « Libération ».

Luz, 40 ans, dessinateur de presse depuis qu'il a abandonné ses études de droit, a croqué l'actuel chef de l'État, de 1994 à 2010. En tout 17,2 kg d'une œuvre drôle et caustique. « Je suis allé jusqu'au bout du personnage, il fallait que je le fasse disparaître pour mieux parler du sarkozysme », raconte-t-il. Oui, sa décision a été « mûrie » et cette disparition devait passer par une « méthode radicale ».

Il en a parlé avec ses copains du Sud-Ouest, Yves, Franck et Rodolphe, propriétaire de la librairie La Mauvaise Réputation à Bordeaux. Yves, un vieil adepte de l'humour à la « Charlie », habite en Lot-et-Garonne. C'est là, sur un coteau de pruniers d'Ente et de tournesols, entre Agen et Nérac que la destruction a eu lieu. Venu avec ses 7,2 kg de dessins de Sarko, Luz a procédé à la destruction à coup de fusil, de tampons encreurs, de cutter, à l'effaceur blanc, sous les roues d'un tracteur et des pierres…

Destruction filmée
Le fils d'Yves a tout filmé. Les images sont projetées depuis hier à La Mauvaise Réputation dans le cadre de l'exposition « Dernières reliques avant l'abattoir ». Car, en fait, Luz n'a pas tout détruit. Il a gardé 17 planches, « comme un ancien fumeur garde toujours un paquet de cigarettes à proximité ».
L'essentiel de l'exposition est constitué de ces 17 rescapés. Ils ont été choisis en fonction de l'événement qu'ils évoquent et des différentes façons avec lesquelles le personnage principal est appréhendé. L'exposition va toutefois évoluer jusqu'au deuxième tour de l'élection présidentielle.
Une grande toile blanche a été posée contre le mur du fond de la librairie. Luz enverra quotidiennement un dessin qui sera collé sur celle-ci. Jour après jour va se bâtir une pyramide illustrée.
Le dimanche 6 mai au soir, Luz sera sur place et dessinera en fonction du résultat de l'élection. Si Nicolas Sarkozy est réélu chef de l'État, il a prévu d'en faire un ultime dessin ; mais le visage du vainqueur sera dissimulé sous une boulette de papier faite à partir d'un dessin de… François Hollande. « Le pouvoir du dessinateur de s'affranchir de l'actualité », dit Luz.

« Dernières reliques avant l'abattoir », du 7 avril au 19 mai, La Mauvaise Réputation, 19, rue des Argentiers

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